A l’ombre des figuiers sauvages

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A propos de la 3ème partie

J'ai vraiment du mal à comprendre une de mes amies qui me dit qu'en votant "non", elle pense à l'avenir de ses enfants. C'est justement pour leur avenir que je vais voter "oui", parce que je veux plus que ce que ne propose l'Europe actuellement.


Comme tous les textes européens, la Constitution est un compromis entre droite et gauche, entre libéraux et sociaux-démocrates. Par rapport aux textes précédents, elle représente une avancée indiscutable qui a été arrachée par la gauche européenne dans la phase préparatoire. C’est mentir que ne pas le reconnaître. Dans la déclaration de principes comme dans la charte des droits, les conquêtes sociales sont protégées au niveau juridique le plus élevé. C’est un grand progrès. Aucun Etat de l’Union ne peut se voir imposer un recul de sa législation sociale. Aucun. Tous sont libres de développer et d’améliorer leur protection sociale. Tous. Ce texte est le plus social de tous les textes européens jusqu’ici mis en œuvre.
[...]
La Constitution est une avancée parce qu’elle leur ajoute des garanties nouvelles : la charte des droits, à laquelle nous pourrons nous référer pour protéger nos libertés, et une organisation des pouvoirs plus efficace et plus démocratique. Si le traité constitutionnel est rejeté, seuls restent les textes actuels. Autrement dit, on nous explique que pour lutter contre des textes qu’on juge mauvais, il faut rejeter le traité qui les complète et les corrige. On vote non à cause de la troisième partie du traité constitutionnel et au bout du compte, que reste-t-il ? La troisième partie ! Quelle logique !


Extrait de l'article du Noubel Obs: Jacques Delors : «Ils vous mentent!».


"Il n'y a pas de oui de gauche et de oui de droite" a déclaré François Bayrou [...] "Le oui, c'est le choix qui est fait par des gens de tous bords, d'avoir enfin une Europe dont les clés appartiennent aux citoyens. C'est un si grand enjeu que ça mérite d'être défendu au-delà des frontières partisanes habituelles"
[...]
"Il faut se projeter en Europe, arrêter d'aller en Europe à reculons", a souhaité Daniel Cohn-Bendit [...] "Le problème n'est pas de changer, c'est d'expliquer aux citoyens pourquoi on change. Oui, moi, par exemple, j'ai changé entre 68 et aujourd'hui, et je peux m'expliquer"


Extrait de l'article du Noubel Obs: Bayrou et Cohn-Bendit unis pour le "oui" .

J'entends aussi dire que ce texte est trop "économique", mais il ne faut pas oublier que l'Europe est, avant tout, une entitée économique. C'est en se regroupant, en harmonisant les relations entre les différents Etats membres que l'Europe d'aujourd'hui s'est faite.

Relire certains des discours des fondateurs de l'Europe (comme celui de Robert Schuman ) permet de mieux comprendre les ambitions et les enjeux de cette construction européenne.


DECLARATION LIMINAIRE

"Messieurs,

Il n’est plus question de vaines paroles, mais d’un acte, d’un acte hardi, d’un acte constructif. La France a agi et les conséquences de son action peuvent être immenses.
Nous espérons qu’elles le seront.

Elle a agi essentiellement pour la paix. Pour que la paix puisse vraiment courir sa chance, il faut, d’abord, qu’il y ait une Europe. Cinq ans, presque jour pour jour, après la capitulation sans conditions de l’Allemagne, la France accomplit le premier acte décisif de la construction européenne et y associe l’Allemagne. Les conditions européennes doivent s’en trouver entièrement transformées. Cette transformation rendre possibles d’autres actions communes impossibles jusqu’à ce jour. L’Europe naîtra de tout cela, une Europe solidement unie et fortement charpentée. Une Europe où le niveau de vie s’élèvera grâce au groupement des productions et à l’extension des marchés qui provoqueront l’abaissement des prix.

Une Europe où la Ruhr, la Sarre et les bassins français travailleront de concert et feront profiter de leur travail pacifique, suivi par des observateurs des Nations Unies, tous les Européens, sans distinction qu’ils soient de l’Est ou de l’Ouest, et tous les territoires, notamment l’Afrique qui attendent du Vieux Continent leur développement et leur prospérité.

Voici cette décision, avec les considérations qui l’ont inspirée ".

LA DECLARATION DU 9 MAI 1950

"La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent.

La contribution qu’une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques. En se faisant depuis plus de vingt ans le champion d’une Europe unie, la France a toujours eu pour objet essentiel de servir la paix. L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre.

L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes, créant d’abord une solidarité de fait. Le rassemblement des nations européennes exige que l’opposition séculaire de la France et de l’Allemagne soit éliminée : l’action entreprise doit toucher au premier chef la France et l’Allemagne.

Dans ce but, le gouvernement français propose de porter immédiatement l’action sur un point limité, mais décisif :

Le Gouvernement français propose de placer l’ensemble de la production franco-allemande du charbon et d’acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d’Europe.

La mise en commun des productions de charbon et d’acier assurera immédiatement l’établissement de bases communes de développement économique, première étape de la Fédération européenne, et changera le destin des régions longtemps vouées à la fabrication des armes de guerre dont elles ont été les plus constantes victimes.

La solidarité de production qui sera ainsi nouée manifestera que toute guerre entre la France et l’Allemagne devient non seulement impensable, mais matériellement impossible. L’établissement de cette unité puissante de production ouverte à tous les pays qui voudront y participer, aboutissant à fournir à tous les pays qu’elle rassemblera les éléments fondamentaux de la production industrielle aux mêmes conditions, jettera les fondements réels de leur unification économique.

Cette production sera offerte à l’ensemble du monde, sans distinction ni exclusion, pour contribuer au relèvement du niveau de vie et au progrès des œuvres de paix. L’Europe pourra, avec des moyens accrus, poursuivre la réalisation de l’une de ses tâches essentielles : le développement du continent africain.

Ainsi sera réalisée simplement et rapidement la fusion d’intérêts indispensable à l’établissement d’une communauté économique et introduit le ferment d’une communauté plus large et plus profonde entre des pays longtemps opposés par des divisions sanglantes.

Par la mise en commun de production de base et l’institution d’une Haute Autorité nouvelle, dont les décisions lieront la France, l’Allemagne et les pays qui y adhéreront, cette proposition réalisera les premières assisses concrètes d’une Fédération européenne indispensable à la préservation de la paix.

Pour poursuivre la réalisation des objectifs ainsi définis, le gouvernement français est prêt à ouvrir des négociations sur les bases suivantes.

La mission impartie à la Haute Autorité commune sera d’assurer dans les délais les plus rapides : la modernisation de la production et l’amélioration de sa qualité ; la fourniture à des conditions identiques du charbon et de l’acier sur le marché français et sur le marché allemand, ainsi que sur ceux des pays adhérents ; le développement de l’exportation commune vers les autres pays ; l’égalisation dans les progrès des conditions de vie de la main-d’œuvre de ces industries.

Pour atteindre ces objectifs à partir des conditions très disparates dans lesquelles sont placées actuellement les productions de pays adhérents, à titre transitoire, certaines dispositions devront être mises en œuvre, comportant l’application d’un plan de production et d’investissements, l’institution de mécanismes de péréquation des prix, la création d’un fonds de reconversion facilitant la rationalisation de la production. La circulation du charbon et de l’acier entre les pays adhérents sera immédiatement affranchie de tout droit de douane et ne pourra être affectée par des tarifs de transport différentiels. Progressivement se dégageront les conditions assurant spontanément la répartition la plus rationnelle de la production au niveau de productivité le plus élevé.

A l’opposé d’un cartel international tendant à la répartition et à l’exploitation des marchés nationaux par des pratiques restrictives et le maintien de profits élevés, l’organisation projetée assurera la fusion des marchés et l’expansion de la production.

Les principes et les engagements essentiels ci-dessus définis feront l’objet d’un traité signé entre les Etats. Les négociations indispensables pour préciser les mesures d’application seront poursuivies avec l’assistance d’un arbitre désigné d’un commun accord : celui-ci aura charge de veiller à ce que les accords soient conformes aux principes et, en cas d’opposition irréductible, fixera la solution qui sera adoptée. La Haute Autorité commune chargée du fonctionnement de tout le régime sera composée de personnalités indépendantes désignées sur une base paritaire par les Gouvernements ; un Président sera choisi d’un commun accord par les autres pays adhérents. Des dispositions appropriées assureront les voies de recours nécessaires contre les décisions de la Haute Autorité. Un représentant des Nations Unies auprès de cette Autorité sera chargé de faire deux fois par an un rapport public à l’O.N.U. rendant compte du fonctionnement de l’organisme nouveau notamment en ce qui concerne la sauvegarde de ses fins pacifiques.

L’institution de la Haute Autorité ne préjuge en rien du régime de propriété des entreprises. Dans l’exercice de sa mission, la Haute Autorité commune tiendra compte des pouvoirs conférés à l’Autorité internationale de la Ruhr et des obligations de toute nature imposées à l’Allemagne, tant que celles-ci subsisteront."

Robert Schuman
Ministre des Affaires Etrangères
9 mai 1950, Quai d’Orsay
Salons de l’Horloge, Paris



A nous maintenant d'y faire rentrer plus de social, pour que d'une Europe économique, nous ayons enfin une Europe des peuples.

Classé dans : Autobiographie
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3 commentaires

#1  - sonie a dit :

Bonjour,

Je voterai non moi aussi !
Je me rappelle avoir voté la même chose pour le traité de Maastricht, et les raisons qui m'amènent à ce choix n'ont pas changées.
Bien souvent quand on parle de mondialisation on pense aux states et bien je crois que l'on devrait penser tout d'abord à l'Europe.
Après tout les américains auront réussi à exporter jusqu'à leur système interne de fonctionnement => et je ne veux pas d'une Europe qui au final deviendra un pays constitué d'états fédérés.
Une Europe sociale quelle belle utopie, elle n'a jamais été établie pour cela et quand on voit le stoicisme des gens c'est pas demain la veille que les peuples manifesteront dans la rue pour que cette nouvelle force commerciale et financière fasse dans le social !
Par contre si on parle fric (après tout c'est ce qui mène le monde que cela fasse plaisir ou pas) nous nous préparons à nous aligner pour le partage des flux économiques entre l'amérique l'europe et l'asie (buldozer montant) !

#2  - Kowalsky a dit :

De mémoire l'Allemagne, la République d'Autriche, la Belgique sont des états fédéraux (la Suisse aussi, mais ne faisant pas partie de l'Union Européenne), il n'y a pas que les USA qui en ont le monopole. ;)
Mais soit rassuré, l'Europe fédérale ce n'est pas pour demain. Je vois mal les actuels états souverains, avec toutes leurs divergeances, déléguer plus de leurs pouvoirs vers l'Europe.

Par contre ton analyse sur les flux économiques est juste, et je pense qu'il faut au contraire s'unir pour mieux s'en protéger (comme le dit l'adage: "l'union fait la force").

C'est en étant fort et en parlant d'une même voix face aux puissances déjà en place (les USA) et émergeantes (Chine, Inde, Brésil, etc) que l'on pourra réduire (et non éliminer, malheureusement) dans nos contrées les dégâts engendrés par la mondialisation.

#3  - sonie a dit :

Ok les states ne sont pas les seuls mais bon on ne cherche pas à tenir la comparaison avec la force commerciale et financière de la Suisse, la Belgique ou l'Allemagne !
David contre Goliath ! pourtant c'était David le vainqueur ca laisse rêveur ;)
Je trouve dommage que sous le prétexte falacieux de ne pas se faire manger tout cru par Goliath et de nous protéger des ravages de la mondialisation, nous mettions en route notre propre golgoth (ça me fait penser à la loi du talion).
Qui ne sera surement pas doté de vertues utopiques mais ne sera qu'un vautour parmis les vautours et dont le but principal sera de nous permettre d'avoir une grosse part du gâteau ! Euros, CAC40, actionnaires, trusts etc etc aiguisez vos couteaux, il est l'heure de passer à table !
On arrive déjà pas à être en osmose sur des points secondaires alors lorsqu'il s'agira de s'unir pour faire face, chacun ira de son petit intéret personnel comme c'est malheureusement souvent le cas.
Bien sûr qu'elle finira par se finaliser cette grande Europe puisque c'est le souhait général, mais à quel prix ! j'espère seulement qu'on sera suffisamment courageux pour se retourner sur tout ceux qu'on aura laissé sur le trottoir au nom du pouvoir de l'euro sur le dollar et qu'aucun silence gênant n'entachera l'histoire de cette mosaique si peu étanche !
;)

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